mercredi 6 mai 2009

Norvège, la vraie droite décomplexée





Norvège: les élections de l'automne prochain avancent à grand pas.
La campagne électorale va être marquée par la très forte ascension du Parti du Progrès (Fremskrittpartiet). Sous la houlette de Mme Siv Jensen, une dynamique nouvelle porte les intentions de vote à une moyenne de 28%.
Comme d'autres partis de droite dure en Europe, nous sommes là en présence d'un sujet à la nature bien différente de celles de nos habituels dinosaures d'extrême-droite.

Car si en effet les partis traditionnels peinent à communiquer sur les étiquettes de communistes, socialistes, sociaux-démocrates, libéraux, chrétiens-démocrates, l'extrême-droite elle a connu une cure de jouvence, imposée et choisie.
Imposée sous la pression commune des opinions publiques et des législations européennes qui ont été vigilantes tout au long du XXe siècle. Les trois tombes vandalisées par des adolescents analphabètes destructurés ne font peur qu'aux corbeaux qui ont trouvé plus noirs qu'eux.
Choisie, car la nouvelle génération qui a pris les commandes de ces partis a intégré certains acquis démocratiques et libéraux, à un point qui aux yeux de certains relève de l'escroquerie.

La facilité consiste à caricaturer, affubler de toutes les mauvaises intentions, renvoyer à la Seconde Guerre mondiale dans des réflexes hérités qui ont bien marché dans les années 80 et 90. Plus rares sont ceux qui acceptent de regarder la réalité en face.
Pourquoi aux Pays-Bas les partis de Rita Verdonk et Gert Wilders, identitaires et islamophobes, arrivent en tête du vote gay? Et ce dans des fourchettes allant de 27 à 40% ?
Pourquoi en Autriche les jeunes électeurs ont placé l'extrême-droite en tête de leurs préférences avec 40% de leurs voix?
Pourquoi en Italie la classe moyenne est le cœur du vote de la Ligue du Nord?

Les commentateurs cherchent toujours des explications techniques. Lassitude, contestation, charisme du leader, populisme et promesses faciles. Ce n'est jamais à cause (grâce?) aux idées défendues.
Il serait peut-être temps d'écouter ce qu'ont à dire les électeurs de ces partis.
Siv Jensen en Norvège en est peut-être la synthèse la plus aboutie:

Féminisme: intégrant les conquêtes des années 60-70-80, contrairement à la vieille extrême-droite caractérisée par les "3 k" allemands: Kirche, Küche, Kinder. Egalité hommes-femmes farouchement défendue.
Environnement: critique des théories des Verts vécues comme une crainte pour la croissance, mais favorables aux politiques de développement durable et de comportements citoyens.
Liberté d'expression: hier c'était pour le révisionnisme, aujourd'hui c'est pour la critique des religions. Plus largement, refus de la criminalisation de la parole.
Mondialisation: refus de mettre en concurrence l'ouvrier européen avec l'ouvrier chinois, taxes douanières en fonction des progrès sociaux et environnementaux des pays en développement.
Islam: refus global "à lui de s'adapter, pas à l'Europe de s'adapter à lui"
Sans effacer le triptyque sécurité-immigration-souveraineté nationale, la droite dure étoffe son discours.

Les sympathisants ne se définissent absolument pas comme des conservateurs réactionnaires, mais bel et bien comme des progressistes, modernes, et vrais défenseurs des valeurs libérales européennes. Vu de France avec notre FN issu de la guerre d'Algérie, on a du mal à s'en rendre compte. Mais la nouvelle droite dure européenne de Wilders, Streiche, Jensen a réussi à symboliser aux yeux d'un bon tiers de l'électorat la défense de nos démocraties modernes.

Ce n'est plus l'extrême-droite qui refusait la modernité. C'est une droite qui incarne la modernité en danger (Islam, mondialisation, Chine, réchauffement climatique...) Supercherie pour les uns. Mutation qui leur ouvre le chemin du pouvoir selon moi. Défi que les partis traditionnels se doivent de relever.



Pour la Norvège, la page Wikipédia en anglais sur les élections à venir et la page norvégienne du FrP sont régulièrement mises à jour.


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